La résistance des entreprises face à la crise ne passe pas par les mêmes stratégies…S’il est une tendance de fond court-termiste de réduire le capital humain pour ajuster les capacités de production à la demande déclinante de ces dernières années, quelques entreprises misent sur le moyen/ long terme en investissant justement sur les hommes et leurs compétences… En effet un certain nombre d’entreprises (certes elles ne sont pas encore légion…) ont décidé, dans un contexte concurrentiel accru, de « muscler » leur capacité en termes de compétences afin de disposer de facteurs différenciants sur leurs marchés.

La formation, pour faire bouger les lignes sans en avoir l’air

Cet investissement – car il s’agit bien d’un investissement – n’est possible que pour des entreprises dont la santé financière et la pérennité ne sont pas en danger, et de fait accentue encore le fossé entre les organisations acculées à des mesures radicales et celles qui peuvent renforcer leurs actifs humains au travers d’un programme de montée en compétence. Il n’en reste pas moins que par les temps qui courent, entreprendre un programme de formation (qui s’apparente aussi à programme de « transformation ») marque un engagement fort, stratégique et courageux…dont le retour sur investissement n’est perceptible que sur le long terme, mais constitue indéniablement l’une des réponses à une « crise » qui n’en finit pas.

Ces programmes de formation ont en général deux caractéristiques majeures :

  • Ils sont souvent l’apanage des « métiers » dans une logique très orientée business. Il est ainsi fréquent de voir se développer des programmes de formation autour des forces de vente, afin tout simplement de « doper » la performance commerciale. De fait ils sont plutôt pilotés par les « métiers » avec une implication en général modérée des RH, qui apportent un support méthodologique, notamment via les référentiels métier et compétences de l’entreprise.
  • Ils sont très fréquemment intégrés à des programmes de « professionnalisation » métier, dont ils constituent le volet aval. En effet ces programmes de professionnalisation sur des domaines bien déterminés qui font souvent l’objet d’évolution technologique forte (telle que les SI qui voient leurs métiers évoluer non seulement avec les technologies, mais aussi avec l’émergence de l’externalisation et du mode « SaaS »), sont en général composés de trois volets :
  1. Identification des évolutions « métier » et « compétence »,
  2. Evaluation ou « assessment » des compétences des collaborateurs concernés notamment par rapport aux évolutions « métier » et « compétence » précédemment évoquées,
  3. Définition du plan de montée en compétence en regard de l’« assessment » des collaborateurs, pour construire un programme de formation ad hoc.

Ces programmes de formation s’inscrivent souvent dans une logique stratégique forte de développement de l’entreprise, ce qui permet de justifier les investissements substantiels qui s’imposent.

Compte-tenu des enjeux d’évolution de carrière et des impacts sur les individus et sur les organisations, ces programmes font l’objet d’un dialogue social très important avec les IRP, qui n’est pas la moindre des activités inhérentes à ces programmes.

De fait ces programmes sont assimilables à de vrais projets de « transformation » d’entreprises et doivent être menés comme tels.

 

Quand les RH et les Métiers réinventent la recette de la formation

 Une professionnalisation autour de ces programmes est actuellement en train de se mettre en place avec l’émergence de plusieurs acteurs, capables de conduire ces projets de formation de A à Z :

  • L’intégrateur ou l’ensemblier qui à l’instar de BearingPoint est capable de structurer / piloter le projet de formation, de définir le catalogue de formation, de sélectionner les prestataires de formation ad hoc, d’organiser , de planifier le déploiement et d’en assurer le suivi.
  • Les prestataires de formation qui sont souvent de petites structures de niche, très spécialisées sur des types de formation et des métiers, pertinents sur un segment bien défini mais pas nécessairement sur l’ensemble du spectre du programme de formation concerné. Le calibrage des attendus des formations avec la valeur ajoutée que peuvent apporter ces prestataires est en général un vrai défi que doit gérer l’intégrateur,  garant de la qualité de prestation globale, et de l’équation budgétaire inhérente à la durée de ces projets et à la nécessité de piloter une kyrielle d’acteurs spécialisés …

 

On le voit pour les entreprises qui peuvent se permettre ce type d’investissement l’enjeu est de taille, car la réussite est une obligation. Or le risque d’un programme de formation à impact faible est grand. Trois facteurs majeurs de succès…ou de risque sont généralement à prendre en compte :

  1. Impact de la formation : On peut considérer qu’une formation qui ne fait pas l’objet  dans la durée d’une mise en pratique et d’un suivi des acquis aura in fine un impact quasi nul (il est généralement admis que 50 % des acquis d’une formation sont perdus s’ils ne sont revus et renforcés dans les 24 heures…). A ce titre plusieurs méthodes permettent de contourner ce risque tels que rendre le contenu des formations accessible ou disponible via un portail à l’issue des formations, demander aux participants d’enseigner à d’autres collaborateurs ce qu’ils ont appris, intégrer la formation dans un Plan de Développement Individuel suivi d’actions concrètes sous l’égide du Manager, etc.
  2. Pertinence et qualité de la formation : Egalement, comme évoqué précédemment la pertinence et la qualité de la formation par rapport aux besoins sont primordiales. Une formation mal calibrée ou pas adaptée ne pourra avoir qu’un effet contre-productif.  Cela exige en préalable une sélection fine des prestataires, sélection à laquelle doivent impérativement être associés des Managers « métier ».
  3. Implication des Managers : Enfin, l’appui des Managers pour la mobilisation des collaborateurs, et leur suivi des formations est aussi clé, car il souligne l’importance donnée à la formation par rapport au quotidien ou à l’opérationnel, et marque l’engagement du Management dans le développement du collaborateur.

Ces trois facteurs doivent impérativement faire l’objet d’un pilotage bien ciblé, qui relève en général de la responsabilité de l’intégrateur, sous l’égide d’un sponsor fort dans l’entreprise.

 

L’effort pour les entreprises qui osent se lancer sur de tels programmes de formation à l’échelle d’un ou plusieurs métiers est conséquent, et nécessite une vraie gestion de projet/programme digne de ce nom ; et si la réussite est au bout de la route, l’impact à moyen/long-terme est double :

  • Bien entendu l’entreprise s’est enrichie collectivement en termes de compétences et devient plus compétitive sur ses marchés,
  • A la fois sur un plan individuel pour les collaborateurs et sur un plan collectif pour l’entreprise, une nouvelle source de motivation et de dynamisme est en général induite pas ces programmes de formation.

Ces deux impacts combinés sont in fine générateurs de performance pour l’entreprise sur la durée en lui conférant une longueur d’avance par rapport à ses concurrents.

Enfin, pour que le jeu en vaille la chandelle, et quelque-part  pour ne pas être victime de son succès, l’entreprise doit ensuite veiller à fidéliser ses « talents » nouvellement formés. Et c’est là que les RH ont tout leur rôle à jouer dans une vraie gestion des « talents », mais c’est là une autre histoire…qui fera l’objet d’un prochain article sur le blog RH de BearingPoint…

Contact: Olivier Chappert, Associé