Dans l’histoire de l’organisation des entreprises, la dimension humaine a été tout d’abord gérée au sein du service du personnel, en charge principalement de la dimension sociale, du recrutement et de la paie. Montant en gamme, le service du personnel est devenu la Direction du personnel, la fonction se professionnalise et intègre la dimension formation et petit à petit la dimension de carrière. Puis l’arrivée de la psychosociologie et les réformes régulières en droit du travail, l’ont transformée en Direction des relations humaines. Enfin, l’approche gestionnaire a pris les devants, pour anticiper, prévoir, calculer les coûts et les retours sur investissement, on en est ainsi arrivé à la gestion des ressources humaines et à la naissance de la Direction des Ressources Humaines.

Ce rapide historique illustre que depuis un siècle la fonction RH se transforme régulièrement, l’évolution et l’élargissement de son périmètre s’accompagnant d’un changement de l’appellation de la fonction.

Or depuis l’apparition de la terminologie de Direction des Ressources humaines, il y a maintenant plus d’une trentaine d’années, le monde de l’entreprise s’est transformé : l’informatique, internet, les générations X, Y et suivantes, la mutation des métiers, la GPEC, le fonctionnement en réseau, l’éveil des consciences sur le développement durable et la RSE ….  Sans entrer dans les détails, au vu de ces nombreuses et profondes évolutions, il est temps de dépoussiérer et de rénover le nom de la fonction pour qu’elle fasse plus de sens par rapport à la réalité même de ses attributions actuelles, voire futures.

D’autres noms sont possibles

La terminologie actuelle met au centre la notion de « ressources » ce qui nous renvoie à une vision utilitariste, où on consomme voire on épuise les ressources. Les tenants du développement durable dénoncent la notion de ressources en ce qu’elle implique en termes d’exploitation et de vision court termiste. Par ailleurs, le terme de ressources n’est pas forcément motivant ou épanouissant pour les personnes que nous sommes.

Remplacer le terme « ressources » par « richesses » donne déjà une vision plus positive de l’humain en entreprise, le faisant passer du statut de ressources que l’on « consomme », à celui de richesse que l’on valorise. La direction des ressources humaines deviendrait ainsi une Direction des richesses humaines, un changement qui en plus n’altère pas l’acronyme de DRH – pour les plus conservateurs. Cette vision donne une autre perspective au travail des RH, plus gratifiante, qui valorise des richesses plutôt que de gérer des ressources.

La notion de Capital Humain souligne l’importance que revêt pour l’entreprise l’actif humain. Néanmoins ce terme, déjà utilisé dans le passé, donne une vision très financière voire propriétaire de l’humain, avec de potentielles dérives. La notion de Patrimoine Humain, quant à elle, implique une logique plus long terme de préservation et de développement sachant que la valeur d’un patrimoine va au-delà de la dimension purement financière et intègre la notion de transmission.

Une autre terminologie possible pourrait faire référence au Développement Humain. Celle-ci implique une dimension dynamique positive et humaniste, orientée vers l’amélioration. Un terme qui donne du sens et qui motive. Ou encore pour être dans l’air du temps, l’animation des Réseaux Humains (note 1), élément clef de l’entreprise 2.0, considérée comme le nouveau rôle de la fonction.

 Certaines de ces appellations sont d’ailleurs, déjà utilisées, même si c’est encore de manière très timide :

  • Quelques personnes se présentent ainsi  comme des Directeurs de Richesses Humaines, par exemple chez Fontalvie SAS, le groupe ETO (spécialisé dans le marketing client), chez Ethias (assureur) ou encore Olivier Lajous anciennement « Directeur des richesses humaines » de la marine nationale
  • L’appellation de Direction du développement humain a, quant à elle, été adoptée chez Flunch
  • L’émergence de la terminologie de Direction des réseaux humains, chez Happy Chic ou Dailymotion (note 2)
  • Plus original, Chateauform’ met davantage l’accent sur la culture, en appelant la fonction « service Talents et culture« 

Un enjeu de crédibilité

Néanmoins « l’habit ne fait pas le moine » et indépendamment du nom donné à la fonction, l’enjeu est bien la crédibilité de la fonction auprès de l’entreprise et de ses salariés. Cette crédibilité repose notamment sur la cohérence entre les missions affichées (à travers son nom, son discours, la personnalité du DRH …) et les actions concrètes  réalisées, alors même que la fonction doit répondre à des injonctions quelquefois contradictoires.

Comme l’analyse Bernard Marr, la fonction RH a finalement 2 clients aux intérêts parfois antagonistes que sont l’entreprise et les salariés. Il propose même de scinder en 2 la fonction RH, pour dissocier les missions rendues d’une part aux salariés, de nature plutôt qualitative, pour les conforter dans leur travail (motivation, culture d’entreprise, bien-être …), et d’autre part celles rendues à l’entreprise, de nature plutôt quantitative pour optimiser la composition de la force de travail (contrôle de gestion sociale, évolution des compétences …). Cette prise de position (note 3) a suscité pas mal de remous sur le net ces derniers mois mais elle reste à tester dans les faits.

Quoi qu’il en soit, peu importe le modèle ou le nom de la fonction, ce qui compte c’est la cohérence : la fonction RH doit vivre avec son temps pour mieux accompagner l’évolution de l’entreprise. Changer le nom de la fonction RH est une opportunité pour lancer une nouvelle dynamique en incarnant de manière crédible et authentique une nouvelle vision de l’humain en entreprise.

Contact: Olivier Parent du Chatelet, Associé