L’open innovation pour faire évoluer l’organisation par l’innovation
Innover et dynamiser les modes de travail sont des enjeux clés dans la transformation des entreprises, c’est ainsi qu’ont été créées depuis quelques années des structures d’open innovation en interne. Les « Sprints » ou « Jam », réunissent divers métiers afin de fabriquer en moins d’une semaine des prototypes de solution potentiellement commercialisables[1]. Les Fab-Lab offrent aux collaborateurs des outils pour fabriquer et tester leurs concepts dans des espaces de travail internes[2]. Certains groupes ont lancé leurs incubateurs et fonds de financement chargés de sélectionner des idées de salariés détachés officiellement le temps d’un projet avec des moyens dédiés[3].
Néanmoins, malgré les atouts de l’open innovation et bien que les modes de fonctionnement « agiles » soient entrés dans le vocabulaire managérial, les projets de transformation se heurtent toujours aux mêmes difficultés : fonctionnement en silo, rétention d’information, manque d’initiative… Les approches classiques ne suffisent plus, compte tenu de la complexité des projets.
L’intrapreneuriat et la culture de Corporate Hacking pour transformer en profondeur
Afin d’accélérer la conception d’offres et leurs mises sur le marché, l’entreprise doit développer des start-up internes, (« start-in »[7]) qui permettent de valoriser des projets, tout en répondant aux aspirations des salariés à plus de liberté et de prise de risque. Bien qu’expérimenté à grande échelle chez Crédit Agricole, Engie et Orange, l’intrapreneuriat est encore sous-estimé, alors qu’il aboutit dans 41% des cas au lancement d’un nouveau produit[4]. Il pourrait prendre un nouveau tournant, avec la création de « CDI de projet »[6] à l’étude par le gouvernement Philippe, qui a pour vocation de créer un cadre juridique attractif pour l’entreprise et le salarié.
Pour simplifier les processus et casser les silos, il est nécessaire aussi de promouvoir une culture de « Corporate Hacker »[5], c’est-à-dire donner aux salariés les moyens et la liberté de détourner toute règle, attitude ou processus allant à l’encontre de la valeur métier ou de l’expérience client. Un « Hack », ou contournement d’une règle, peut prendre diverses formes[6] : le développement d’une application progressivement généralisée en interne, le test informel d’un produit auprès d’utilisateurs[7], le détournement d’un processus ou reporting, la mise à disposition d’une ressource, le réaménagement d’un espace… toujours au service des utilisateurs internes ou externes.
Loin d’être des électrons libres et rebelles, l’intrapreneur et le Corporate Hacker peuvent faciliter le changement en profondeur[8], les atouts de cette culture sont multiples :
Essaimer ces valeurs est clé, en particulier dans des contextes de transformation digitale dont la réussite dépend notamment de la fluidité des relations entre les fonctions, la capacité de l’organisation à apprendre et la transparence des processus.
Généraliser les pratiques de Corporate Hackers pour améliorer la performance d’une organisation
Enfin, pour les organisations les plus matures, qui, face à des problèmes complexes, font émerger des solutions du terrain, l’analyse de pratiques déviantes fournirait des leviers concrets et durables d’amélioration à intégrer dans un projet de transformation. Goldman Sachs a ainsi doublé la performance de ses conseillers en généralisant les Hacks des équipes dont les résultats étaient supérieurs à la moyenne. Des projets similaires ont été menés par Alstom Transport, Merck ou Hewlett Packard[10].
Bien que le succès des initiatives tournées vers l’Intrapreneuriat et le Corporate Hacking soit avant tout humain et difficilement mesurable, elles mobilisent des ressources et des moyens provenant de diverses composantes de l’organisation. L’heure n’est pas encore au bilan, de nombreuses expérimentations sont en cours mais il faut s’y préparer. Les entreprises vont donc devoir se doter d’indicateurs et de modes de fonctionnement partagés avec tout l’écosystème interne pour suivre la cohérence de ces initiatives dans le temps pour une transformation durable.
Auteurs : Anne-Sophie Alibert, Senior Consultante & Muriel Monteiro, Partner