A la suite de la publication du livre blanc « Les tableaux de bord : attentes, pratiques et résultats » mené avec la DFCG, BearingPoint a souhaité mettre en avant le parallèle entre un tableau de bord automobile et celui de gestion utilisé en entreprise. Dans cette optique, BearingPoint s’est rapproché d’un expert du secteur automobile, chef de projet du lancement d’une voiture. Nous avons confronté son point de vue d’opérationnel avec celui de Damien Palacci, associé en charge de l’offre « Pilotage de la performance » chez BearingPoint.

Q1 : Quelles fonctions doit remplir le tableau de bord ?

Expert de l’automobile : Les tableaux de bord automobiles répondent d’abord à des obligations réglementaires qui imposent une quinzaine d’informations indispensables à la bonne conduite du véhicule. Ainsi, le combiné, qui est la partie du tableau de bord directement sous les yeux du conducteur, permet de conduire en toute sécurité et en respectant la règlementation. Selon le profil du véhicule, le tableau de bord pourra être enrichi pour apporter quelque chose de plus au client (compte-tours, pression d'huile, pression d'eau, etc.).

DP : Les dirigeants et financiers interrogés lors de l’étude convergent sur deux grands objectifs pour le tableau de bord de gestion : suivre la mise en œuvre des objectifs stratégiques et opérationnels mais également piloter son périmètre d’activité. Avec les progrès récents en matière de mise à disposition de l’information, les managers attendent désormais une information plus fiable, disponible rapidement, accessible en mobilité et corrélée avec des leviers d’action, présentée de manière synthétique (20 indicateurs maximum).

 

Q2 : Quels types d’informations doit-on porter dans le tableau de bord ?

Expert de l’automobile : Le choix des informations et des alertes est très contraint. Aux réglementations nationales viennent s'ajouter les contraintes d’organismes comme EuroNCAP. Des alertes supplémentaires ont donc été ajoutées pour des raisons de sécurité (alerte sonore et visuelle de débouclage de ceinture par exemple). On essaie de regrouper les alertes pour simplifier le tableau de bord : un témoin générique "service" se double d'un message explicatif sur l'écran multi fonction. Si on mettait toutes les informations obligatoires et facultatives sur un tableau de bord, on obtiendrait le cockpit d'un Boeing 747, trop complexe à piloter pour une personne non avertie.

DP : La nature des indicateurs continue à évoluer pour favoriser l’équilibre financier/non financier. Les indicateurs financiers occupent une place prépondérante dans le tableau de bord avec une nette volonté de diminuer ce poids à moyen terme au profit d’indicateurs RH, de suivi de projet et de risques/contrôle interne.

 

Q3 : Quel est l'ordre de priorité dans l'accès à l'information ?

Expert de l’automobile : Sur les véhicules disposant d'un affichage tête haute, nous dupliquons les 3-4 informations les plus fréquemment utilisées. Le combiné permet, lui, la lecture directe des informations prioritaires et des alertes. Les informations secondaires sont disponibles à la demande via un écran multi fonctions sur le combiné ou sur l'écran déporté de la navigation. L’objectif final que nous recherchons est de concentrer l'information au maximum pour en faciliter la lecture.

DP : Un tableau de bord efficace offre une lecture de l’information de pilotage à plusieurs niveaux. Avec les progrès réalisés en matière d’accès à l’information et le « nomadisme » des managers, le premier niveau de lecture doit être la synthèse directement lisible sur Smartphone avec une vue synthétique des indicateurs et les commentaires clés associés. Si le manager souhaite avoir plus d’information, il doit pouvoir accéder à un fichier attaché pour plus de détails (détail des chiffres, tableaux comparatifs, etc.). Enfin, des analyses plus détaillées disponibles à la demande vont permettre d’approfondir l’analyse et de faire le lien avec le reporting.

 

Q4 : Quelles sont les technologies permettant de mettre à la disposition de l’utilisateur des informations plus rapidement et de manière plus efficace ?

Expert de l’automobile : L’arrivée de l’écran numérique en remplacement de l'affichage analogique classique pourrait permettre à l'avenir au conducteur de choisir son affichage (analogique simulé, numérique, mixte), ainsi que les informations affichées. Tout est fait pour réduire au maximum la charge mentale nécessaire à la conduite : allumage automatique des feux de croisement ou des essuie-glaces. Il faut donner au conducteur toutes les informations dont il a besoin pour prendre une décision. Agir à sa place risquerait de le déresponsabiliser, or il doit rester le maître à bord.

DP : Contrairement aux outils de la sphère personnelle et notamment les tableaux de bord de voiture, le monde professionnel semble n’avoir pas encore réussi à faire face à l’augmentation exponentielle de l’information communiquée. Pour 64% des répondants à notre étude, les systèmes d’information sont ressentis aujourd’hui comme le premier frein à l’évolution des tableaux de bord. L’outil numéro 1 du tableau de bord est encore Excel : son succès s’explique par ses capacités de restitution, mais aussi et surtout par sa flexibilité. Il existe cependant un besoin extrêmement fort de se doter d’outils spécialisés afin de mieux structurer et outiller la réalisation des tableaux de bord, en accélérer et en faciliter la mise à disposition.

 

Q5 : En quoi le parallèle entre les tableaux de bord automobile et de gestion est-il pertinent ?

Expert de l’automobile : Le design d’un tableau de bord de véhicule présente un intérêt majeur : tout le monde sait le lire immédiatement. Les alertes s'affichent clairement en cas de besoin, accompagnées d’un signal sonore pour les plus critiques. Vous disposez des quelques informations essentielles et les autres sont accessibles à la demande sur les afficheurs numériques. Ces caractéristiques pourraient être appliquées au tableau de bord de gestion. La différence avec l’automobile, c’est l’instantanéité de la réponse. Au volant, on doit pouvoir connaître sa vitesse à tout moment car on peut agir instantanément sur le frein.

DP : Nous l’avons vu précédemment, un tableau de bord efficace offre aussi une lecture de l’information de pilotage à plusieurs niveaux comme dans l’automobile. Les graphiques doivent permettre d’analyser les indicateurs sans ambigüité, les codes couleur sont également appréciés des managers. A contrario, l’instantanéité de la réponse n’est pas de mise dans l’entreprise mais l’un des grands motifs d’insatisfaction actuels est la parution trop tardive du tableau de bord pour un pilotage efficace. Depuis longtemps, le tableau de bord automobile intègre un « tableau de panne ». Dans la plupart de nos entreprises, nous nous contentons de diriger avec des indicateurs de performance uniquement (KPIs). C’est donc l’un des enseignements que l’on peut tirer de bord automobile : une gestion des risques efficace via le suivi d’indicateurs sur les contrôles clés (KRIs) qui permettent d’anticiper et de prévenir la dérive des KPIs.

Contact : Damien Palacci