A l’instar du travail lui-même, les espaces de travail ont connu, au cours des décennies, de grandes évolutions. Une grande tendance est observée ces dernières années : celle du passage de l’environnement de travail utile, figé, et individuel à un environnement de travail pragmatique et stratégique, partie intégrante des politiques RH et RSE des entreprises.

Les attentes des collaborateurs : moteur de transformation des environnements de travail

 Le choix et l’aménagement des environnement de travail suscite aujourd’hui un véritable engouement et « l’objet architectural » longtemps au cœur des attentions, laisse aujourd’hui peu à peu place à l’occupant qui se situe désormais au centre de toutes les réflexions. En effet, le lieu de travail n’est plus une simple commodité, un produit immobilier destiné à fournir le clos et le couvert à des collaborateurs, il est pensé comme un véritable espace vivant au service de la performance et se fait l’incarnation de nouvelles méthodes de travail. L’influence de la génération Y et l’intérêt qu’elle porte aux GAFA, startups et à leurs modes de travail redéfinissent durablement les normes d’aménagements de ces espaces de travail. Dans un contexte de « guerre des talents », les entreprises cherchent désormais à investir dans leurs aménagements et offres à l’occupant pour se rendre plus attractive, séduire et retenir de nouvelles recrues sur un marché du travail tendu.

A bien des égards, l'environnement de travail est donc de plus en plus déterminé par les occupants. Aujourd’hui, les enjeux de l’environnement de travail dépassent largement la sphère de l’immobilier pour rayonner sur des thématiques RH. Une enquête BearingPoint réalisée en 2017 sur les attentes en matière d’environnement de travail auprès d’occupants de tous âges et de toutes catégories socio-professionnelles, révélait que 80 % des occupants restent très attachés à la possibilité de s’installer dans les locaux de l’entreprise, quand bien même les occupants peuvent désormais travailler de n’importe quel lieu (le domicile, le café, les espaces de co-working, le lieu de travail étant devenu pluriel). Ce chiffre important révèle que l’entreprise est plébiscitée comme lieu social, ou l’on vient travailler ensemble, co-créer, plus qu’un lieu de travail individuel. Les locaux de l’entreprise se doivent de répondre à ce besoin particulier via des aménagements favorisant le travail collectif, en brisant autant que possible les frontières physiques et hiérarchiques, en favorisant l’épanouissement du collaborateur, en stimulant sa créativité et en améliorant sa productivité et in fine, la productivité de l’entreprise.

Au delà des attentes, les grands enjeux de la transformation des environnements de travail :

  • Favoriser les échanges et la collaboration entre les collaborateurs
  • Permettre l’ouverture de l’entreprise vers l’extérieur
  • Incarner l’image et les valeurs de l’entreprise

Les leviers de transformation des environnements de travail

Face à ces attentes et enjeux, largement stimulées par les nouvelles générations, les entreprises peuvent répondre par deux leviers :

  • Le premier levier concerne les espaces de travail : en effet, avec un nouveau rapport entre les espaces individuels et les espaces collaboratifs (bien entendu en faveur des espaces collaboratifs) l’entreprise se doit d’opter pour une une « agilité » des espaces en fonction des usages. Si un certain formalisme doit-être maintenu avec un mobilier pratique et des salles de réunions, ces salles doivent par exemple être équipées avec des outils digitaux afin de permettre les communications à distance et favoriser la créativité. Au-delà de l’aspect digital, le choix du mobilier, la décoration et l’esprit de l’entreprise doivent également être travaillés pour injecter une dose d’informel et favoriser le décloisonnement (des lieux et des activités) et le dynamisme.
     
  • Le second levier concerne les services à l’occupant, qui sont aujourd’hui en pleine transformation avec l’éclosion d’une myriade de services dont la demande est boostée par l’arrivée en entreprise des nouvelles générations. Ces services, autant professionnels que personnels, sont si nombreux qu’il devient parfois difficile de distinguer le bon grain de l’ivraie… On observe cependant l’émergence de services autour de plusieurs grandes thématiques : le quotidien (logement, transport, restauration, coworking, conciergerie…), le bien être (le sport et la santé, le confort, l’environnement et le développent durable…) et le « smart building » (accessibilité, bâtiment connecté, services favorisant l’optimisation des espaces grâce au digital…). Des écueils sont à éviter : afin que l’offre ne soit pas jugée « trop cosmétique » par les collaborateurs, il est nécessaire que cette dernière reste relativement restreinte et en cohérence avec les valeurs de l’entreprise et les besoins réels des collaborateurs.

L'environnement de travail : vecteur de la transformation des modes de travail

Les changements observés dans nos environnements de travail ne sont que la partie émergée des transformations plus profondes qui s’opèrent sur nos modes de travail. Deux grandes évolutions de nos modes de travail accompagnent aujourd’hui ces transformations :

  • Une mobilité des collaborateurs à conjuguer avec la préservation du lien social. En effet, la mobilité caractérisée par un éloignement régulier de l’entreprise ne doit pas se faire au détriment du sentiment d’appartenance à l’entreprise. C’est ainsi que les accords de télétravail sont en général limités à deux jours par semaine au maximum. C’est aujourd’hui un enjeu qui incombe à la DRH de pouvoir trouver un subtil équilibre entre mobilité et préservation du lien social…
     
  • Une évolution du rôle de manager et des modes de management : le développement de la flexibilité des espaces et de la mobilité des collaborateurs entraîne une évolution des modes de management, en passant d’un management de proximité à un management à distance, avec une évolution des relations entre managers et managés. Elle implique comme prérequis un bon niveau de confiance du manager vis-à-vis de ses équipes. Elle amène un ajustement de la manière d’évaluer les équipes : il s’agit en effet de passer d’un management fondé sur le contrôle de présence physique, à un management basé sur les objectifs et les résultats. Elle nécessite enfin de la part du manager une bonne maîtrise des outils de communication.
     

In fine, la question du changement de nos environnement de travail s’inscrit dans une réflexion plus large autour de la redéfinition du rôle même de l’entreprise et de la transformation de nos modes de travail. Changer d’espace ou le transformer, investir dans de nouveaux services où outils digitaux, toutes ces actions visent donc à donner corps à une entreprise agile, dynamique, créative, qui, dans son rôle social est également capable de faciliter la vie de ses collaborateurs.

Auteur :
Olivier Chappert, associé