Le chatbot est un programme informatique semi-autonome construit pour répondre à un ensemble de messages relativement simples par des réponses pré-paramétrées. Cet « agent conversationnel » utilise les données internes et/ou externes à l’entreprise qui sont mises à sa disposition pour fournir la réponse la plus pertinente au regard de la question posée. Dans sa version la plus sophistiquée, le chatbot intègre l’intelligence artificielle via le « machine learning » : il apprend des échanges avec ses interlocuteurs et est capable, en conséquence, d’adapter ses analyses, ses comportements et les réponses produites.

A l’origine utilisés par les grandes entreprises du retail pour améliorer la relation et la satisfaction client, les chatbots se sont rapidement diffusés ces dernières années et leur utilisation s’est démocratisée. Peut-être faites-vous, vous-même, déjà l’usage de chatbots au travers de Facebook Messenger où ils sont très présents (« Jam » en est un exemple), ou sur certains sites de e-commerce qui, à la première occasion, affichent un conseiller virtuel chargé de vous guider dans votre parcours client.

En constante évolution, nourrie par les retours d’utilisation, cette technologie a atteint un niveau de maturité suffisant pour que d’autres secteurs et fonctions de l’entreprise s’y intéressent. La Direction des Ressources Humaines, qui considère de plus en plus les collaborateurs comme des clients internes, se penche à présent sur les possibilités que lui offre cet outil. Face à cette tendance, une question peut tout de même se poser : le chatbot RH constitue-t-il un véritable atout pour l’entreprise ?

Les chatbots RH : un gain de poductivité et un potentiel d’attractivité…

Une revalorisation de la fonction RH

FAQ nouvelle génération et personnalisée, le chatbot permet au collaborateur d’obtenir des réponses rapides et immédiates à des questions du quotidien. Par la réalisation de tâches simples telles que le renseignement de droits à congés, l’envoi de bulletins de salaire, le renseignement de règles de gestion ou de fonctionnement interne, le chatbot permet de libérer du temps de travail et de recentrer les professionnels RH sur des tâches à plus grande valeur ajoutée. De plus, le temps de traitement généré par un email ou un appel téléphonique n’existe plus et le service au collaborateur en est significativement amélioré. Pour les plus convaincus, le chatbot peut se révéler être un complément ou une alternative efficace et économique au front-office des traditionnels CSP et autres Helpdesk généralement mis en place pour apporter un premier niveau de réponse aux collaborateurs.

Une création de valeur pour l’entreprise par le traitement de la data RH

L’emploi d’un chatbot présente un double intérêt en ce qui concerne les données. En rassemblant les questions fréquemment posées par les collaborateurs, il permet d’identifier les informations manquantes ou insuffisamment mises en valeur et aboutit ainsi à une amélioration du fonctionnement et des processus internes. S’il peut analyser de la donnée liée à sa propre activité, il peut également lui-même procéder à une collecte directe d’informations, en réalisant des enquêtes de satisfaction par exemple, et en synthétisant leurs résultats.

Une aide décisionnelle pour certaines activités RH

Le chatbot peut également se révéler une véritable aide décisionnelle. A ce titre, l’emploi d’un chatbot dans le domaine du recrutement est intéressant : à l’image d’un assistant RH, l’intelligence artificielle peut effectuer un certain nombre de tâches (réaliser des tests de personnalité, de compétence ou de motivation), délivrer un premier niveau d’analyse des candidatures et déterminer leur compatibilité avec l’entreprise. Si le processus de recrutement ne peut se départir de l’intelligence humaine, l’intervention d’un tel outil peut rendre cette tâche plus simple pour les professionnels des ressources humaines d’une part, et plus efficace d’autre part puisqu’elle leur permettrait de se séparer de leurs biais de jugement naturels et d’intégrer ainsi une palette plus variée de candidatures.

Le renforcement de la marque employeur

Enfin, la mise en place réussie d’un chatbot participe à l’amélioration de l’expérience collaborateur, ce qui est positif pour l’image de l’entreprise. En effet, celle-ci sera alors identifiée comme moderne, innovante, et tournée vers le bien-être des individus qui y travaillent. L’utilisation de cette technologie, à laquelle peut être confronté directement le candidat dès l’étape du recrutement, si on en fait le choix, peut ainsi renforcer la marque employeur et constituer un vecteur d’attractivité pour la génération Y accoutumée à ce type de procédés. L’anthropomorphisation du bot, par la construction d’une identité visuelle, d’une « personnalité » quasi-humaine (ton et vocabulaire utilisés, intégration ou non de gifs et de smiley, etc.) participent à la construction de cette marque employeur.

… à condition de remplir un certain nombre de caractéristiques

Il convient de rappeler que le chatbot RH ne reste qu’un outil d’intelligence artificielle : il est incapable d’une pensée propre et n’agit qu’en fonction des capacités et clés qui lui sont données. En ce sens, il ne constitue un véritable atout que s’il est pensé intelligemment et qu’il répond à certaines conditions.

L’importance de la définition du besoin 

Afin d’être efficace, le chatbot doit répondre à une problématique et des besoins précis. Si les possibilités sont techniquement nombreuses, encore faut-il savoir ce que l’on souhaite. C’est à la condition d’effectuer ce premier travail de circonscription des enjeux et des besoins fonctionnels et techniques auxquels l’outil doit répondre que celui-ci sera performant. Une fois le besoin identifié et questionné, il sera possible de bâtir la base de connaissance sur laquelle reposera l’outil et d’établir avec exhaustivité les différentes informations, règles et algorithmes qui seront utilisés pour répondre aux demandes des collaborateurs.

Le pilotage et la mise à jour : des éléments stratégiques

Si l’outil est capable de faciliter le travail de la Direction des Ressources Humaines, il n’en remplacera jamais les professionnels de la fonction et ne fonctionnera pas sans pilotage et surveillance constants. Sur ce dernier point, on se rappellera par exemple des dérives de « Tay » chatbot lancé par Microsoft en 2016. Le champ des ressources humaines étant en perpétuelle évolution, le chatbot RH doit l’être également. Cette condition est particulièrement importante dans le cadre du chatbot RH puisque, à la différence des autres programmes informatiques utilisés par exemple en e-commerce, les données mobilisées sont particulièrement sensibles et peuvent avoir, en cas d’erreur, des conséquences lourdes. Le choix de l’intelligence artificielle, en cela qu’elle est capable d’évoluer en intégrant son environnement, peut influer sur ce besoin en pilotage.

Le chatbot RH : l’opportunité d’une transformation organisationnelle

Afin de capitaliser sur la mise en place d’un chatbot et de prendre toute la mesure de son efficacité, il convient de penser, et ce bien en amont, à la transformation organisationnelle qu’elle implique. La projection de la transformation du métier RH est une étape clé : l’apparition d’un chatbot va libérer des ressources au sein de la DRH et il faudra penser à les redistribuer de façon cohérente. De nouveaux profils pourront venir compléter la galerie des compétences présentes dans l’entreprise : c’est le cas des « data analyst RH » par exemple. Le pilotage et l’administration de la base de connaissance du chatbot nécessitent que les équipes RH acquièrent de nouvelles compétences : elles pourront être développées notamment grâce à la formation.

La conduite du changement : un élément clé

Aspect souvent négligé, la réussite de la mise en place d’un chatbot tient également à l’effort de conduite du changement qui y est associé. Un outil, bien qu’innovant, sera inutile s’il ne parvient pas à trouver son public. Il est donc important que l’entreprise dans son ensemble, Direction des Ressources Humaines comme collaborateurs soit prête à l’utiliser. Dans le cas du chatbot avec intelligence artificielle, cette condition est d’autant plus importante puisqu’elle va déterminer les capacités techniques de l’outil et donc son efficacité : plus il communique avec les collaborateurs, plus il sera performant.  Plan de communication, formation, éventuellement recrutements spécialisés, tout un dispositif doit donc être au service de la réussite du projet. Cependant, s’il est essentiel de « jouer le jeu » il est important de ne pas nourrir le fantasme collectif qui entoure l’intelligence artificielle et la relation homme-machine : le résultat serait forcément déceptif. Il convient donc de modérer les attentes des futurs utilisateurs avec un message clair : le chatbot RH n’est pas un divertissement dont il faut tester les limites, il est un véritable outil du quotidien qu’il faut considérer pour son utilité.

En conclusion, l’utilisation des chatbots dans les ressources humaines peut présenter des intérêts multiples à condition que le travail de définition du besoin et que le pilotage de l’outil soient maitrisés. Enfin, la conduite du changement associée à la mise en place du chatbot RH sera déterminante à son adoption ; il s’agit finalement de susciter l’intérêt des collaborateurs pour les faire adhérer au projet.