Les entreprises marocaines continuent de marquer leur empreinte en Afrique et d’y gagner du terrain. Les stratégies des entreprises marocaines témoignent des différentes étapes de leur développement et des caractéristiques qui y sont associées. En effet, aujourd’hui, les performances des entreprises peuvent en partie être imputées aux modèles économiques et modes opératoires choisis. Face à l’importance d’assurer de nouveaux relais de croissance grâce au développement en Afrique, des interrogations apparaissent notamment en raison des incertitudes liées à la crise de la Covid-19 :

  • Quels modèles économiques et modes opératoires adoptent les entreprises pour leur développement en Afrique ?
  • Quelles perspectives d’évolution envisagent-elles en termes de modèles économiques et de modes opératoires en Afrique ?
  • Comment se démarquent-elles dans le contexte de la pandémique actuelle ? Quel impact de la crise sur les évolutions des modèles économiques et modes opératoires en Afrique ?

Des divergences existent certainement, mais elles ne sont pas aussi radicales qu’on pourrait le penser.

Pour la 4ème fois depuis 2011, le Baromètre du Développement International (BDI) du Maroc, a analysé les stratégies de développement des entreprises marocaines. Et comme pour l’édition 2015, l’édition 2020 s’est intéressée précisément au développement des entreprises marocaines sur le continent africain.

1. Le développement des entreprises marocaines en Afrique : vision comparative 2015-2020

Le développement en Afrique est devenu un axe stratégique de premier ordre pour les entreprises marocaines. En effet, il est aujourd’hui inscrit leurs gènes : 84% des entreprises interrogées considèrent que le développement en Afrique fait partie du top 3 des priorités stratégiques en 2020.

Le développement vers les marchés africains est devenu un objectif primordial pour les entreprises marocaines. L’Afrique est le 1er bénéficiaire des investissements directs marocains : en 2017, plus de 60% des Investissements Directs à l’Etranger (IDE) marocains ont été réalisés en Afrique. En effet, le Maroc est parmi les premiers investisseurs africains de l’Union économique des États de l’Afrique de l’Ouest (UEMOA) et de la Communauté des États de l’Afrique centrale (CEMAC)[1]. Cette présence renforcée sur le continent est soutenue par une stratégie nationale en faveur de la promotion de la coopération Sud-Sud.

Bien que ciblant prioritairement l’Afrique de l’Ouest, la présence des entreprises marocaines en Afrique semble désormais gagner du terrain sur le reste du continent. En effet, les entreprises marocaines explorent également l’Afrique de l’Est, l’Afrique centrale et australe. Cette présence renforcée s’explique principalement par la réintégration du Royaume au sein de l’organisation panafricaine en 2017 et par l’engagement de sa Majesté Mohamed VI à faire de l’Afrique une priorité.

En 5 ans, les principaux modes opératoires restent les mêmes dans les grandes masses avec deux principaux changements :

  • Une cohorte plus importante d’entreprises ayant des processus formalisés dans les prises de décisions sur les développements internationaux. Ce profil se retrouve dans plus du tiers des entreprises et a progressé de 20% en 5 ans, essentiellement au détriment des profils procéduriers - qui représentent un cinquième. Les entreprises marocaines évoluent donc dans leur mode de traitement de l’internationalisation.
  • Près de 3 entreprises sur 10 ont un profil de « conquérant ». Si cette proportion est quasi identique à celle de 2015, elle se renforce par une dynamique de gestion du temps plus important. Le développement du numérique n’est pas étranger à cette évolution.

De manière générale, la logique de filiale l’emporte désormais au détriment de la simple représentation commerciale pour 55% des acteurs interviewés. Quant aux modalités de gestion, les entreprises marocaines s’orientent de plus en plus vers une gestion décentralisée avec une autonomisation plus forte des filiales vis-à-vis du siège (pour 40% des répondants).

 

2. Les modèles économiques adoptés par les entreprises marocaines en Afrique

Si les plus grandes multinationales européennes et américaines se font le porte-étendard de nouveaux modèles économiques, sous-tendus par le vecteur digital et exploités à travers une hybridation graduelle de leurs modèles actuels, la plupart des entreprises marocaines implantées en Afrique continuent d’opérer selon les modèles classiques de détenteurs/producteurs d’actifs ou de fournisseurs de services.

En effet, la majorité des entreprises marocaines adopte le même modèle économique pour son développement en Afrique, avec une palette de produits et services identique à celle proposée au Maroc. Ces entreprises se concentrent principalement sur leur capacité de résilience à travers l’optimisation de leurs coûts aux fins d’une meilleure performance économique.

Cependant, de nouvelles initiatives sont nées et laissent présager l’adoption de modèles économiques nouveaux, complémentaires. Cela se confirme dans le panel des entreprises marocaines interrogées, où 54% des acteurs déclarent être prêts à faire évoluer leur modèle économique, vers un modèle complémentaire ou hybride pour générer plus de croissance.

3. La crise pandémique, un accélérateur vers la digitalisation des modèles économiques

Le développement des entreprises marocaines en Afrique a en partie été impacté par la crise pandémique. En effet, 55% des entreprises marocaines interrogées estiment que la crise pandémique du Covid-19 a eu des impacts directs sur leurs activités sur le continent.

La crise pandémique a renforcé cette réflexion désormais initiée par les entreprises marocaines pour l’adoption de modèles économiques nouveaux et complémentaires. En effet, 71% des entreprises du panel estiment que la crise du Covid-19 est un accélérateur pour repenser son modèle économique. Bien qu’elle ait impacté l’activité des entreprises en Afrique, elle a également été un accélérateur à travers l’adoption du digital comme transformateur de business.

De nombreuses initiatives digitales ont vu le jour pour venir en soutien aux différentes activités. La crise a bel et bien accéléré l’essor du commerce électronique en Afrique : les plateformes en ligne s’adaptent et offrent des produits essentiels pour répondre aux besoins des citoyens.

4. L’hybridation, comme vecteur de croissance des entreprises

Le changement de modèle économique ne nécessite pas forcement une transformation radicale. Il est possible d’opter pour une trajectoire évolutive et incrémentale, particulièrement pour les produits et services existants. L’enjeu est de tracer ce sillon en maîtrisant les technologies digitales. Mais cela ne se fera pas du jour au lendemain.

Contrairement aux schémas européen et américain, l’exploitation de modèles économiques hybrides n’est pas née d’une diversification progressive des activités des entreprises, sous-tendue par la nécessité d’une meilleure performance économique. Elle découle ici d’innovations locales visant à répondre à un besoin réel, renforçant davantage la pertinence du leapfrog[2] digital africain.

L’émergence de plateformes digitales représente le facteur le plus disruptif dans l’hybridation des modèles économiques soutenus par la croissance d’une nouvelle ère digitale en Afrique. Les start-ups africaines sont aujourd’hui le meilleur porte-étendard des modèles économiques hybrides en Afrique.  A cet effet, le paiement mobile représente la success story africaine d’un modèle hybride par essence.

 

[1] Développement des entreprises marocaines en Afrique : réalité et perspectives - Direction Etudes et des Prévisions Financières

[2] Dépassement

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