Nous avons vu la semaine dernière un rappel des principales actions de la Sécurité Sociale et les différentes branches qu’elle supervise, ainsi qu’une première ébauche des dispositions actées. Nous verrons par la suite de nombreuses autres dispositions visant à durcir la lutte contre la fraude et renforcer les mesures de prévention et d’accès aux soins. 

Un appel à la lutte renforcée contre la fraude  :

Avec la LFSS 2024, le gouvernement entend affirmer une ambition forte sur le domaine de la fraude, la lutte contre les abus, et au sous-paiement des cotisations, puisque Thomas Fatôme, Directeur Général de la Cnam avait confirmé son engagement à détecter et à arrêter 380 millions d’euros de fraudes en 2023 avec pour objectif 500 m€ en 2024. Des fraudes principalement commises par les professionnels de santé représentent un manque à gagner d’environ 4 milliards d’euros par an selon la Cour des Comptes. 

Il faut savoir que les différentes conventions signées entre l’assurance maladie et les représentants des professionnels de santé prévoient aujourd’hui la prise en charge d’une partie des cotisations sociales dues par ces professionnels. L’Article 7 facilite le désengagement de l’assurance maladie au paiement des cotisations sociales de certains professionnels de santé en cas de non-respect des dispositions conventionnelles. L’objectif est de lutter contre la fraude aux professionnels de santé qui sont à l’origine des deux tiers des abus, des fraudes qui concernent principalement les audioprothèses. 

Un autre volet de la lutte consiste à pister la fraude aux cotisations sociales et les sous-déclarations de chiffres d’affaires (estimée à 800 millions d’euros de perte à la Sécurité Sociale) en permettant aux OCAM de réclamer à un professionnel libéral coupable de fraude le remboursement, en plus des sommes qui lui ont été versées par la caisse, des cotisations sociales qu’elle a payées directement à l’URSSAF pour son compte. 

 

Enfin, et dans un contexte où la hausse du taux d'absentéisme et les abus sont observés, la loi entend renforcer les contrôles sur les arrêts de travail  :  

  • En élargissant le périmètre d’accompagnement aux centres de santé et aux sociétés de téléconsultation dont le taux de prescription apparaît anormalement élevé en comparaison aux pratiques observées sur le territoire (précédemment à la LFSS 2024, l’accompagnement ne concernait uniquement que les médecins présentant un taux important de prescription d’arrêts) ; 
  • En limitant à trois jours la durée des arrêts prescrits ou renouvelés en téléconsultation hors médecin traitant. 

Un déploiement renforcé de la prévention et une facilité d’accès aux soins  :

La prévention reste une priorité pour le gouvernement face aux évolutions socio-économiques, démographiques et climatiques. Dans cette optique, la LFSS 2024 vise à déployer les bilans de prévention précédemment actés par la LFSS 2023 et pris en charge à 100% par l’Assurance maladie, avec de nouveaux âges clés ciblés : 18-25 ans, 45-50 ans, 60-65 ans et 70-75 ans. Ces bilans de prévention offriront à l’assuré l’opportunité d’engager un échange dédié avec un professionnel de santé afin d’évaluer ses habitudes de vie, d’identifier les facteurs de risques associés et in fine bénéficier d’un accompagnement personnalisé et ciblé. L’objectif primordial de ces bilans est de détecter et de prévenir des comportements néfastes, encourager les initiatives favorables à la santé, ainsi que d’anticiper l’apparition des maladies lourdes et couteuses (pour toutes les parties prenantes) telles que certains cancers, le diabète, ou encore les affections cardiovasculaires. 

Ce volet a été enrichi également par des mesures visant les plus jeunes en facilitant l’accès à des actes de prévention, notamment la gratuité des préservatifs (féminins et masculins) en pharmacie pour les moins de 26 ans, la vaccination gratuite contre les infections au papillomavirus à partir de 11 ans ou encore le remboursement des protections périodiques réutilisables pour les femmes de moins de 26 ans et les bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire afin de remédier à la précarité menstruelle. D’autres mesures, en phase avec les débats actuels, concernent la santé mentale des plus jeunes avec la possibilité d’orienter les élèves vers le dispositif « Mon soutien psy », facilitant ainsi une meilleure prise en charge des victimes d’harcèlement scolaire et renforçant l’accompagnement en santé mentale des élèves.  

Enfin, la LFSS 2024 offre aussi des parcours d’expérimentation (dont les modalités seront déterminées par décret) avec une approche multidisciplinaire en associant des professionnels médicaux, des psychologues, des sage-femmes et des puéricultrices dédiées à l’accompagnement de femmes souffrant de dépression post-partum. A titre expérimental, il serait également possible de financer des actions d’accompagnement des personnes traitées pour un cancer et en affection pour une longue durée, en proposant des bilans de condition physique et des séances d’activité physique adaptée. 

Depuis 2023, la Sécurité Sociale intensifie sa chasse à la fraude sociale et traquent les auteurs, principalement des professionnels de santé, assurés et allocataires. D’un autre côté, elle entend toujours faire de la prévention un cheval de bataille, notamment en élargissant plusieurs dispositifs et priorisant des actions en phase avec sa politique de Qualité de Vie et des Conditions de Travail (QVCT). Ce remaniement ne sera pas sans effet sur les Organismes Complémentaires d’Assurance Maladie (OCAM), dont le dynamisme de dépenses dépend fortement de la politique menée par le ministère de la Santé et de la Prévention, ainsi que les autres instances décisionnelles aux LFSS 2024. 

Auteurs :
Nicolas Boulay
Géraldine Guitard
Charlène Sessegolo
Fatine El Bakkouri

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