L'’entreprise étendue : un modèle de collaboration étroite avec les fournisseurs et tierces parties
L'entreprise étendue est une expansion du modèle traditionnel d'entreprise, dans lequel les activités étaient principalement concentrées au sein des limites organisationnelles.
Aujourd'hui, les frontières entre les entreprises deviennent de plus en plus perméables, permettant des interactions plus fluides et une collaboration plus étroite entre différents acteurs. Cette approche transcende les silos organisationnels pour favoriser une intégration plus profonde et une coopération mutuellement bénéfique.
L’entreprise étendue se distingue de l’entreprise traditionnelle sur les axes suivants :
Orientation stratégique à long terme :
Elle met l'accent sur la durabilité et la planification à long terme, en intégrant des stratégies qui envisagent les tendances et les changements futurs du marché. Cette mentalité tournée vers l'avenir permet à l'entreprise étendue de s'adapter de manière proactive plutôt que réactive, assurant ainsi sa longévité et sa pertinence dans un paysage en évolution rapide.
Parties prenantes définissant la frontière de l’entreprise :
Elle élargit l'horizon des parties prenantes en incluant divers partenaires comme des fournisseurs de technologie, des sociétés de logistique ou encore des institutions académiques, favorisant un écosystème multi-acteurs. Cette intégration stimule le partage des connaissances et l'innovation, rendant l'entreprise plus résiliente et dynamique.
Collaboration renforcée :
Elle s'oriente vers un modèle collaboratif d'innovation et de création de valeur, dans lequel les idées et les ressources sont mises en commun par les différents membres. Cette approche permet non seulement d'accélérer l'innovation, mais aussi de répartir plus équitablement les risques et les opportunités entre les participants, ce qui conduit à des relations plus durables et mutuellement bénéfiques.
Infrastructure numérique unifiée :
Elle adopte une plateforme numérique commune, intégrant des technologies telles que le cloud computing et l’utilisation du PLM ou l’ERP à travers le réseau. Cette infrastructure unifiée facilite une interaction transparente entre tous les participants, réduisant le besoin d'adaptations individuelles et créant un environnement cohésif et efficace pour le partage des données et l'innovation collaborative.
L’intégration des partenaires en utilisant le PLM peut constituer une réponse clé pour la mise en œuvre l’entreprise étendue.
Le PLM : un outil au coeur de l'entreprise étendue
L'entreprise étendue préconise l'intégration des systèmes PLM dans l'ensemble du réseau étendu, y compris les fournisseurs et les clients. Cette approche garantit un partage transparent des données hébergées dans le PLM, améliorant la transparence et la collaboration dans le développement des produits et la gestion de leur cycle de vie. Elle permet de relever des défis majeurs tels que la conformité réglementaire et la complexité des réseaux de fournisseurs, et s'aligne sur des objectifs tels que la numérisation des échanges entre les parties prenantes et la concentration sur les tâches à valeur ajoutée.
La mise en place d'un PLM dans le cadre d’une entreprise étendue implique une collaboration étroite avec les fournisseurs pour gérer efficacement le cycle de vie des produits. Techniquement, cela peut être réalisé selon 3 approches distinctes :
1. Interconnexion des instances PLM :
Les entreprises peuvent établir une connexion entre leur propre système PLM et ceux de leurs fournisseurs. Cette intégration permet un échange de données bidirectionnel entre les deux systèmes, facilitant ainsi la collaboration sur la conception, le développement et la gestion des produits pendant leur cycle de vie. Les informations telles que les spécifications du produit, les modifications de conception et les mises à jour peuvent être partagées en temps réel, ce qui améliore la visibilité et la coordination entre l'entreprise et ses fournisseurs.
2. Attribution de droits d’accès :
Le PLM offre la possibilité d'ouvrir la solution aux différentes parties prenantes d’un projet, en définissant les droits d’accès pour préciser les types d’actions possibles et la visibilité des modules spécifiques. Les fournisseurs peuvent bénéficier d’accès en lecture ou en écriture, leur permettant de collaborer avec les clients dans un outil unique. Cette configuration garantit une collaboration efficace tout en maintenant la sécurité des informations sensibles grâce à des droits d’accès restreints et adaptés aux besoins de chaque partie prenante.
3. Portail fournisseur :
La mise en place d’un portail fournisseur offre deux scénarios possibles. Tout d’abord, le portail fournisseur peut être directement intégré au PLM si ces deux solutions proviennent du même éditeur. Dans ce cas, l’intégration des données PLM vers le portail se fait de manière transparente. Cependant, il est également envisageable d’utiliser un autre système intermédiaire, tel qu’un ERP, pour faciliter cette intégration. Cela permet une collaboration plus étroite tout en préservant la confidentialité des informations sensibles.
1. Interconnexion entre deux PLM : un chantier ambitieux pour un échange sécurisé de données
L’intégration des systèmes de PLM des entreprises et des fournisseurs sera un impératif stratégique pour les organisations qui souhaitent améliorer l’efficacité et la réactivité tout au long du cycle de développement des produits et de la chaîne d’approvisionnement. En connectant les deux PLM, les mises à jour et les boucles de rétroaction sont activées en temps réel, garantissant que les ajustements de conception sont instantanément communiqués et ajustés au sein de la chaîne d’approvisionnement. Cela permet d’éliminer les silos de données, de réduire les reprises et de prendre des décisions plus rapidement, améliorant ainsi la productivité globale. Cette approche permet aussi de maintenir des données cohérentes et précises sur les deux systèmes, ce qui peut améliorer les prévisions, la gestion des stocks et la planification de la production.
Cette approche, encore peu développée, nécessite de s’assurer de lacompatibilité =entre les plateformes. Sa mise en place doit passer par les étapes suivantes :
- La première étape est la définition des objectifs de l’intégration pour s’aligner sur les objectifs et les exigences des entreprises.
- La deuxième étape consiste à sélectionner les technologies et les protocoles d’intégration appropriés, tels que les interfaces de programmation d’applications (API), les middlewares et les plates-formes d’intégration, afin de faciliter l’échange de données transparent entre les systèmes PLM
- Ensuite il faut établir les règles de mappage et de transformation des données pour assurer la compatibilité et la cohérence entre les structures, les formats et la sémantique des données dans les systèmes PLM
- Finalement, il s’agit d’aligner les processus sur les deux PLM. : identifier les chevauchements de données entre les deux systèmes, les besoins de circulation des données d’un système à l’autre et les éléments déclencheurs des échanges. Cela implique une collaboration entre les différentes équipes pour assurer le consensus et la clarté.
Quelques bonnes pratiques s’imposent pour faciliter l’intégration en toute sécurité : assurer la compatibilité des données entre les systèmes, adopter des plateformes cloud pour plus de flexibilité, prioriser la cybersécurité pour protéger les réseaux intégrés.
Malgré les avantages et les opportunités que l’intégration des deux systèmes peut offrir notamment la différentiation concurrentielle et la création de valeur, elle peut présenter des défis et des risques tels que la qualité et la compatibilité des données : en effet, cette approche nécessite de traiter de grands volumes de données et de s’assurer que ces données sont exactes, cohérentes et compatibles entre les deux systèmes. Les divergences ou les incompatibilités de données peuvent entraîner une mauvaise prise de décision, des inefficacités opérationnelles et, potentiellement, des défaillances du système.
2. Un accès partagé restreint pour favoriser la collaboration et éliminer les silos d’information
La collaboration avec les fournisseurs devient de plus en plus complexe en raison de la multiplication des partenaires, ce qui entraine plusieurs difficultés de coordination :
- Les fournisseurs peuvent être situés sur différents fuseaux horaires
- Les échanges sont faits par email ou partage d’écran, ce qui peut entrainer une perte d’informations
- Les modifications ne sont pas mises à jour en temps réel, les délais de réponse sont ainsi allongés, ce qui peut impacter la production
Afin de remédier à ces problèmes, les entreprises peuvent offrir un accès contrôlé et conditionné à leur propre système PLM aux fournisseurs. Il suffit que le fournisseur dispose d’une connexion internet, il obtient son propre lien unique, ce qui permet d »accéder en toute sécurité aux données produit du client. Le fournisseur peut également mettre à jour des données spécifiques, comme les détails des composants fournis, les statuts des livraisons et les commentaires sur les projets en cours.
Ces modifications peuvent intervenir non seulement durant la phase de production, mais également en amont pour les échantillons par exemple. Ainsi, les fournisseurs peuvent collaborer dès les premières étapes de développement, ajustant les prototypes et les échantillons selon les retours des équipes internes. Cette granularité dans les droits d’accès assure que chaque fournisseur ne voit et ne modifie que les informations qui lui sont destinées, évitant ainsi toute divulgation non autorisée d'informations sensibles.
Cet accès partagé permet de rassembler le fournisseur et les parties prenantes sur un seul système, ce qui leur permet de travailler facilement ensemble. Cela permet aussi d’accélérer les cycles de conception et de retour d’information, ce qui améliore le délai de mise sur le marché, le coût du développement des produits ainsi que le contrôle de qualité.
3. Le Portail fournisseur est une interface clé pour renforcer l’intégration des partenaires externes
L’intégration permet aux fournisseurs de s'impliquer dès les phases initiales du cycle de vie du produit, notamment lors de l'envoi et de la validation des échantillons.
Dans ce cadre, les fournisseurs ont par exemple la possibilité de suivre l’envoi des échantillons à travers le portail. Cela peut inclure l'envoi d'échantillons physiques, accompagné des informations numériques (fiches techniques, descriptions…) ou d'échantillons numériques dans le cas de prototypes virtuels. Le fournisseur soumet ces éléments pour validation à l'équipe interne de l'entreprise.
Les équipes internes peuvent valider ou demander des modifications, envoyer des commentaires et suivre les réponses du fournisseur en temps réel. Le fournisseur peut soumettre de nouvelles versions des échantillons jusqu'à leur validation finale.
Un autre type d’intégration permet de créer les ordres d’achat via le portail. Une fonctionnalité de confirmation est mise à disposition, permettant la mise à jour et la validation de l’ordre d’achatmais également des fonctionnalités plus poussées, notamment la gestion des demandes de changement, le fractionnement des commandes, les mises à jour de quantité, de prix et de dates.
En résumé, la mise en place du portail fournisseur en aval comme en amont de la production permet une collaboration continue entre le fournisseur et l'entreprise, de la soumission initiale des échantillons à la validation d’un ordre d’achat, tout en offrant une traçabilité complète des échanges. Cela permet d'améliorer l'efficacité et d'assurer que les produits livrés répondent aux attentes.
Le choix de l’approche d’intégration nécessite une analyse à plusieurs niveaux sur les axes métier et technique
| Aspect | 1. Interconnexion des instances PLM | 2. Attribution de droits d'accès | 3. Portail fournisseurs |
|---|---|---|---|
| Sur combien de processus métiers les parties prenantes doivent-elles être intégrées ? | Intégration de nombreux processus métiers avec les fournisseurs, tels que la gestion des échantillons, la demande de devis, la validation des pièces, la gestion des modifications, et la logistique. | Limitation de l'intégration à certains processus spécifiques, comme la demande de devis, la validation des pièces, ou le suivi des commandes, mais n'englobe pas tous les processus métiers. | Utilisation pour des processus limités, comme la demande de devis, la soumission des pièces pour validation, ou l'accès aux documents de spécification. |
| Quelle est la complexité des processus métier ? | L'intégration directe des PLM demande des systèmes et processus très complexes pour synchroniser les données entre les deux entreprises. | L'accès restreint limite la complexité, car les fournisseurs n'ont accès qu'à certaines fonctionnalités. | Les processus métiers restent assez simples, mais peuvent devenir complexes si des demandes fréquentes ou des workflows personnalisés doivent être ajoutés. |
| Quels sont les systèmes qui interagissent avec le PLM ? | Nécessité d’interagir avec plusieurs systèmes : ERP, MDM, CRM, ainsi que les systèmes des fournisseurs (leurs PLM, leurs systèmes logistiques, etc.). Chaque interaction ajoute de la complexité. | Les interactions sont limitées à certains systèmes internes de l'entreprise, mais n’implique pas autant de connexions directes avec les systèmes des fournisseurs. Seuls quelques processus spécifiques sont interconnectés. | Interaction principalement avec le PLM de l'entreprise, mais peu avec d'autres systèmes. Des connexions simples à l'ERP ou aux systèmes de gestion de commandes peuvent être mises en place. |
| Quel est le coût d’intégration ? | Nécessité d’une intégration personnalisée des deux PLM. | Configuration des accès et des droits pour chaque fournisseur. | Création et maintenance d'un portail dédié aux fournisseurs. |
| Quel est le niveau d’évolutivité de la solution ? | Toute modification nécessite une mise à jour des deux PLM. | Accès adaptable en fonction des besoins, mais les droits d'accès doivent être revus. | Facilité d’adapter ou modifier le portail sans impact sur le PLM principal. |
| Quel est le niveau de confidentialité des données gérées ? | Accès à un grand volume de données sensibles des deux entreprises. Une sécurisation stricte est donc nécessaire, notamment pour les informations critiques. | Ce modèle permet de limiter la diffusion de données sensibles, tout en assurant la traçabilité des actions. | Les données sensibles peuvent être isolées, et les fournisseurs n'ont pas d'accès direct au PLM. |
Comment accélérer la mise en place de l'entreprise étendue ?
Pour conclure, les industries sont confrontées à des défis croissants, notamment en matière de traçabilité, de durabilité environnementale et de complexité des développements. Le PLM, en tant qu’outil central et collaboratif de gestion du cycle de vie des produits, joue un rôle clé pour répondre à ces enjeux tout en s’intégrant harmonieusement avec d’autres systèmes du SI. Il permet aussi d’utiliser des technologies nouvelles comme l’intelligence artificielle pour améliorer son confort d'utilisation.
Par ailleurs, l'ouverture des processus internes à des acteurs externes (fournisseurs, partenaires) permet d'optimiser grandement la collaboration et les échanges grâce au concept d'entreprise étendue. Cependant, son intégration dans le PLM nécessite des adaptations précises, notamment en termes de gestion des accès et des droits, pour garantir à la fois la sécurité des données et l'efficacité des échanges.
Il est donc important de prendre en compte ces différents chantiers pour accélérer la mise en place de l'entreprise étendue :
Débuter avec des projets pilotes :
La mise en œuvre d'un modèle d'entreprise étendue doit s'effectuer progressivement, à partir d'un projet au périmètre restreint, avec des partenaires stratégiques pour tester l'intégration des systèmes et ajuster les process sans perturber l'ensemble de l'organisation. Cela permettra par la suite d'identifier des pistes d'amélioration pour un déploiement à plus grande échelle.
Utiliser des interfaces normalisées mais évolutives :
Pour faciliter l'intégration d'acteurs externes aux outils PLM, il est nécessaire de disposer d'interfaces standardisées pour réduire les coûts de développement, mais également accélérer les installations. Il est également essentiel de laisser la possibilité à ces interfaces d'être modifiées pour accompagner l'évolution des besoins de l'entreprise.
Mettre en place une gouvernance adaptée :
Pour garantir une adoption rapide, il est essentiel d'instaurer une gouvernance robuste qui définit les rôles, responsabilités et droits d'accès des différents acteurs. Cette dernière doit s'adapter aux évolutions du marché, tout en assurant une cohérence globale et une sécurité des données partagées.
Faire des retours d'expérience pour préparer les projets suivants :
Enfin, il est crucial de tirer régulièrement des leçons des projets pilotes et des premières phases de déploiement. L'adaptation continue à partir des retours d'expérience permet d'affiner la stratégie d'intégration, et de garantir une mise en œuvre plus rapide et plus fluide sur l'ensemble des partenaires pour la suite.
Accompagner le changement :
Comme pour la plupart des sujets, certains acteurs sont réticents aux changements. Il est donc nécessaire de former et accompagner salariés, ainsi que les prestataires externes aux bonnes pratiques. Communiquer sur les bénéfices de l'entreprise étendue avec pédagogie permet de débloquer les potentielles résistances aux projets.
Pour en savoir plus, contactez nos experts :
- Thomas Zarazik, Senior Manager
- Aicha Eddekkaki, Senior Consultante