Le boom de la mobilité verte a pour conséquence une hausse de la demande en véhicule électrique et donc en batterie électrique : sa composante la plus précieuse. Toutefois comme vu dans un précédent article, la construction d’un véhicule électrique a un impact non négligeable sur l’environnement. Ainsi selon l’ADEME, sa construction est deux fois plus polluante que celle d’une voiture thermique classique, essentiellement du fait de la fabrication de sa batterie. 
Plusieurs solutions s’offrent alors pour diminuer cet impact sur l’environnement : l’écoconception et le recyclage des batteries. 

Naturellement, l’optimisation de l’extraction des métaux pour mettre en place des pratiques moins nocives, ou écoconception, est un levier d’action important. Cette meilleure gestion de l’extraction passera nécessairement par un travail des sociétés minières pour mettre en place des stratégies visant à réduire l’exposition aux risques environnementaux. Cette prise de conscience est déjà en cours. Par exemple, l’entreprise Eramet a vu ses engagements en termes d’amélioration d’exploitation minière validés par Act4nature (association qui a pour but de sensibiliser les entreprises françaises au respect de l’environnement). Ainsi un des engagements de l’entreprise d’ici 2023 est d’obtenir un ratio surfaces réhabilitées/surfaces défrichées supérieur à 1.

A long terme, l’option la plus pérenne pour limiter l’impact environnemental des véhicules électriques demeure le recyclage des batteries avec la possibilité de ré-utiliser les métaux précieux pour de nouvelles batteries et de fonctionner en « circuit fermé ».

En plus des effets pervers sur l’environnement, la production de batteries (et des métaux les composant) présente des risques importants d’approvisionnement pour les pays importateurs. Leur criticité fait donc aussi du recyclage des batteries un enjeu stratégique de disponibilité des matières premières. La possibilité de recycler certains éléments réduirait donc la demande de matières premières et cela permettrait de réduire la demande mondiale en 2040 de 25% pour le lithium, 35% pour le cobalt et le nickel et 55% pour le cuivre, selon un rapport de l'Institut des futurs durables (ISF) en 2021.

Dans un premier temps, les objectifs de la filière de recyclage de batterie sont de réduire les impacts environnementaux du véhicule électrique. Elle permet notamment :

  • De réduire les émissions de CO2 d’une tonne eq.CO2 par tonne de batterie et
  • D’éviter l’extraction minière de métaux avec des impacts critiques sur la biodiversité et les ressources en eau (voir ci-dessus).

Outre l’allongement de la durée de vie du produit à travers de nouveaux usages, l’objectif ultime est une économie circulaire de la batterie. Pour atteindre cet objectif l’Union Européenne commence à réglementer le recyclage des batteries :

  • En 2025, les constructeurs de batterie devront respecter un taux de contenu recyclé minimum obligatoire (par exemple, de 12% pour le Cobalt). Ces taux entraineront une augmentation considérable de l’utilisation des sous-produits du recyclage pour la construction de nouvelles batteries.
  • En 2030, l’Union Européenne imposera également de passer de 45% du poids total de la batterie recyclé à 70% en 2030. Ce qui n’est pas destiné à produire de nouvelles batteries de véhicules électriques pourra être utilisé pour le stockage d’énergie pour les énergies renouvelables ou encore pour les bornes de recharges rapides.

En plus d’un impératif légal, le recyclage en boucle fermé passera nécessairement par une optimisation du recyclage chimique des batteries.

Le recyclage d’une batterie suit ainsi les étapes suivantes :

  • la collecte et la mise en sécurité
  • le démantèlement qui correspond à la séparation des différents modules de la batterie
  • le recyclage mécanique vise à séparer les éléments plus ou moins précieux dont la « black mass », une poudre qui contient principale un mélange de carbone, nickel, lithium et cobalt
  • le recyclage chimique : c’est l’étape la plus cruciale. La « black mass » est traitée chimiquement. Il existe deux technologies de procédés :
    • La pyrométallurgie : le procédé le plus simple mais qui est très énergivore et qui ne permet pas de récupérer des sous-produits les plus purs possibles
    • L’hydrométallurgie : qui permet d’avoir une extraction beaucoup plus pure de chaque métal et d’optimiser leur réutilisation
  • la production de précurseurs : dans le cas où les sous-produits de l’hydrométallurgie sont suffisamment purs, ils sont intégrés à la production de précurseurs qui seront intégrés à de nouvelles batteries ce qui viendra « fermer » la boucle du recyclage.

Les deux enjeux du recyclage des batteries de véhicules électriques sont donc, d’une part d’optimiser les procédés hydro métallurgiques pour obtenir des sous-produits les plus purs possible et d’autre part d’augmenter les capacités du recyclage pour répondre à la demande à venir.

Pour récupérer des sous-produits les plus purs possibles, les entreprises des différentes industries s’associent pour optimiser le procédé au maximum sur toutes les étapes de la chaîne de valeur, ce qui explique un scope d’acteurs très variés sur le marché du recyclage de la batterie du véhicule électrique (exploitant minier, constructeur automobile, constructeur de batterie, spécialiste du traitement des déchets, chimistes industriels etc.). A titre d’exemple, Eramet (exploitant minier) s’est associé à SUEZ pour construire une usine pilote pour le recyclage chimique des batteries et réfléchit également à intégrer la production de « black mass ». Veolia, leader mondial de la gestion des déchets, s’associe à Solvay, spécialisé en chimie et au constructeur automobile Renault. Enfin, Orano spécialiste également dans le traitement des déchets dangereux et en hydrométallurgie, s’associe au CEA, Paprec, MTB Manufacturing et à Saft spécialisé dans la conception, fabrication et commercialisation de batteries.

Enfin, en plus de l’optimisation du procédé, la hausse des capacités de recyclage est essentielle pour faire de la France un acteur majeur du recyclage. La demande de recyclage de batterie est directement liée à la production de batterie d’il y a dix ans (durée de vie actuelle d’une batterie) qui était encore faible en Europe. Aujourd’hui les capacités européennes en termes de recyclage de batterie sont d’environ 15 000 tonnes par an selon Pierrick Drapeau, responsable d’un groupe de travail du comité stratégique de filière Mines et Métallurgie. En 2027 selon le comité stratégique de filière (CSF) mines et métallurgie la demandera sera de l’ordre de 50 000 tonnes par an et devrait atteindre 700 000 tonnes en 2035 nécessitant une hausse drastique des capacités de recyclage en France pour rester un acteur majeur du marché.

Ainsi, pour que le véhicule électrique entraine une diminution des atteintes à l’environnement du secteur des transports, la nécessité est double : d’une part en faisant évoluer le mix électrique du pays vers un mix neutre en carbone et d’autre part en inscrivant le véhicule électrique, notamment, sa batterie au sein d’une économie circulaire.

 

Auteurs :
Marie Nouveau, consultante
Lionel Braun, manager

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