La gestion du patrimoine immobilier des universités représente un axe stratégique majeur, à la fois pour les universités elles-mêmes, puisque l’immobilier représente leur second poste budgétaire après la masse salariale, mais également pour l’Etat qui est, aujourd’hui encore, propriétaire de 82% des biens immobiliers universitaires.
Par ailleurs, l’Etat a inscrit dans la loi relative aux Libertés et Responsabilités des Universités (LRU) de 2007 l’objectif, à long terme, d’augmenter l’autonomie des universités. Une des incarnations principales de cette autonomie concerne l’immobilier avec l’expérimentation, en 2011 et 2016, de deux vagues de dévolution de la propriété du patrimoine de l’Etat vers les universités.
Pour autant, afin que ces dévolutions puissent se poursuivre et que les universités puissent prendre entièrement la responsabilité de la gestion et de l’entretien de leur patrimoine, trois grands enjeux restent à prendre en compte.
1. Les trois grands enjeux de la gestion du parc immobilier universitaire
a. La connaissance détaillée du parc immobilier universitaire
Bien que la connaissance du parc immobilier universitaire se soit améliorée au fil des années, elle reste imparfaite. Dans l’ensemble, les services du patrimoine des universités n’ont qu’une connaissance parcellaire de l’état des surfaces occupées par les différents services et populations.
La connaissance du parc immobilier universitaire est, par ailleurs, rendue particulièrement difficile du fait de la diversité de typologies d’espaces et d’usages associés, chaque espace étant soumis à des réglementations différentes : laboratoires de recherche, amphithéâtres et salles de cours, restaurants universitaires, logements, espaces de bureaux, etc.
S’ajoute à cela une problématique supplémentaire associée aux systèmes d’information immobilier utilisés par les universités. En effet, ils ne sont pas toujours compatibles avec ceux utilisés par les acteurs de la politique immobilière de l’Etat. Cela pénalise les comparaisons avec les référentiels nationaux qui permettraient d’enrichir la connaissance globale de l’immobilier universitaire.
Enfin, notons que les services du patrimoine des universités ne disposent pas toujours des ressources humaines internes techniquement compétentes pour correctement suivre et mettre à jour les informations nécessaires.
b. La nécessaire remise à niveau du patrimoine
Aujourd’hui, un tiers du patrimoine immobilier universitaire est dans un état peu ou pas satisfaisant[1], appelant à une rénovation d'ampleur.
Après la période d’investissements massifs des années 1990 puis 2000 s’accompagnant de la création d’universités nouvelles et de la construction de bâtiments pour absorber le flux de nouveaux étudiants, l’objectif est désormais de rationaliser et rénover les surfaces existantes.
Le patrimoine immobilier universitaire doit également évoluer pour épouser les nouvelles dynamiques d’enseignement qui appellent à repenser l’aménagement intérieur des salles de cours et l’organisation des campus.
La nécessaire rénovation du patrimoine doit aussi permettre la prise en compte des nouvelles réglementations énergétiques et environnementales, notamment autour du décret tertiaire.
c. Clarifier les sources de financements et les porter à la hauteur des enjeux
Pour que la rénovation du patrimoine immobilier universitaire puisse avoir lieu, il est essentiel de clarifier l’ensemble des sources de financements à disposition des universités et de s’assurer que leur montant permet de couvrir les besoins.
Aujourd’hui, les universités ne disposent pas des moyens suffisants pour remplir leurs obligations d’entretien courant, de gros entretien renouvellement (GER) et de mise en conformité réglementaire (décret tertiaire, accessibilité, etc.).
Même si des programmes exceptionnels ont été mis en œuvre (Plan Campus, Programmes d’investissements d’avenir, France Relance) permettant de combler une partie du retard, il reste encore à consolider un mécanisme de financement stable, passant par des canaux simplifiés et doté de montants suffisamment conséquents. En effet, si le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche estime à 7 milliards d’euros le coût de la réhabilitation du patrimoine universitaire, France Université porte l’estimation à 15 milliards d’euros, dont 75% du montant associé à la transition énergétique et environnementale.
2. Le Schéma Directeur Immobilier (SDI) : un outil stratégique en plusieurs axes pour répondre aux différents enjeux de l’immobilier universitaire
Les défis précédemment cités demandent une réponse claire de la part des décideurs. Dans ce cadre, la définition d’un Schéma Directeur Immobilier permet d’apporter une vision long-terme quant à l’utilisation et la gestion du patrimoine immobilier de l’université, tout en garantissant l’alignement avec les objectifs globaux de cette dernière.
a. Analyse des besoins
Premièrement, une connaissance holistique du patrimoine de l’université est primordiale. Afin de constituer un Schéma Directeur Immobilier solide, il est nécessaire de procéder à une analyse approfondie de l’ensemble des besoins des usagers de l'université (enseignants, étudiants, chercheurs, etc.).
A partir d’une collecte de l’ensemble des données pertinentes concernant l’utilisation actuelle des installations et équipements de l’université (plans, coûts d’exploitation, etc.), les besoins peuvent être identifiés et priorisés afin de définir des objectifs pertinents et cohérents.
b. Planification à long terme
A partir des besoins et objectifs précédemment identifiés, le Schéma Directeur Immobilier doit permettre de planifier les actions à mettre en œuvre pour atteindre la vision à long terme.
Pour cela, l’université doit également université identifier et évaluer les scénarios futurs en matière d’immobilier (évolution du marché, règlementations à venir, etc.), afin d’être préparée aux différentes éventualités et de définir les investissements immobiliers à considérer pour mettre en œuvre les actions retenues.
c. Gestion du cycle de vie du patrimoine immobilier
La gestion du cycle de vie du patrimoine immobilier (acquisition, conception, construction, exploitation, maintenance, cession) fait partie intégrante du SDI. En effet, en fonction des besoins, la maintenance, la rénovation et la modernisation des bâtiments existants permet à la fois de prolonger leur durée de vie lorsque cela est pertinent, mais également d’améliorer leur performance énergétique.
d. Gestion des risques
Le SDI a également pour vocation de servir de guide dans la couverture vis-à-vis des risques immobiliers. En permettant l’identification des risques multiples, qui peuvent être liés aux problématiques environnementales croissantes mais aussi aux enjeux juridiques et financiers, ce dernier aide à la définition de modalités d’atténuation des éventuels risques et impacts associés afin de proactivement sécuriser son patrimoine.
e. Intégration des critères de développement durable
Le secteur de la construction ayant un fort impact sur l’environnement, notamment en termes de consommation d’énergie et d’eau, d’émissions carbone et d’impact sur la biodiversité, le SDI se doit d’intégrer des critères de développement durable afin de permettre aux bailleurs de maîtriser l’empreinte environnementale de leur bâti. C’est pourquoi ce dernier permet également de favoriser la construction de bâtiments écologiques et durables en portant une attention particulière à ces enjeux sur chacun des axes précédemment cités.
3. Conclusion
Afin que les universités puissent prendre entièrement la responsabilité de leur patrimoine, il leur faut considérer trois grands enjeux :
C’est pourquoi le Schéma Directeur Immobilier, en apportant une vision long-terme sur le patrimoine des universités et en incluant les défis environnementaux contemporains, est l’outil idéal pour installer ces dernières comme véritables actrices de la transition énergétique et environnementale en cours.
Depuis 2019, BearingPoint est membre du groupement titulaire du marché Conseil immobilier de l’UGAP.
Ce référencement nous permet d’accompagner régulièrement des universités dans la réalisation de leur Schéma Directeur Immobilier avec par exemple :
Découvrez en vidéo le témoignage du directeur du patrimoine de l’Université de Poitiers sur notre accompagnement :
https://youtu.be/ZY9IgSwDkns
Marc Pichot de la Marandais et Mathias Zemiro
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[1] Rapport de la Cour des Comptes « L’immobilier universitaire », octobre 2022